Les codes spécifiques et les grands principes des affiches de films de genre

 

Films d’actions et d’aventures

La grande constante de l‘affiche du film d’action est une division horizontale (quelques fois verticale) de sa surface. La partie inférieure reste généralement dans l’ombre et la nuit. C’est le domaine du mal.On donne à la partie supérieure un chromatisme souvent orangé (ciel rougeoyant, aurore ou crépuscule, soumis aux flammes, aux explosions…). C’est le monde de la violence, de la passion. La ligne d’horizon est ainsi franchement matérialisée, elle devient frontière entre le jour et la nuit, c’est-à-dire entre le bien et le mal, entre la vie et la mort. C’est de la partie supérieure qu’émerge traditionnellement le héros. Il est souvent présenté en buste (visage et épaules) et, non en action comme on pourrait le croire à priori. En cadrant le personnage de face et en buste (ou en plan américain), ce sont les valeurs morales (sacrifices, courage…) qui sont mis en avant.Le héros est fait d’une seule pièce : les personnages des films d’action ne doivent pas être problématiques (contrairement à ceux des films policiers). Le héros a une conscience claire de la situation : il est donc au centre de l’affiche. Les regards sont ceux des vrais héros : ceux qui font face à leurs destins. On y sent de l’assurance et de la tension. Ils nous regardent droit dans les yeux. On peut être en présence d’un héros solitaire ou d’un groupe. Mais il existe toujours un leader, un chef qui est au premier plan.Placés au-dessus de l’ombre et de la lumière, ces hommes savent distinguer le bien du mal, et savent qu’ils devront défendre le premier du second. Bien entendu, ils sont armés : fusils, mitraillettes, épées… Appliquons ces remarques à deux affiches de films d’un même auteur, reconnu maître du genre : Steven Spielberg. Il s’agit des affiches de Il faut sauver le soldat Ryan (1998) et Amistad (1997), donc d’un film de guerre et d’un film d’aventures.

Alors que les forces alliées débarquent à Omaha Beach, Miller doit conduire son escouade derrière les lignes ennemies pour une mission particulièrement dangereuse : trouver et ramener sain et sauf le simple soldat James Ryan, dont les trois frères sont morts au combat en l'espace de trois jours. Pendant que l'escouade progresse en territoire ennemi, les hommes de Miller se posent des questions. Faut-il risquer la vie de huit hommes pour en sauver un seul ? (source : Allociné.com)

Après avoir décrit les différents éléments de l’affiche (dénotation), il nous faut décrypter les messages qu’elle émet (connotation) :

L’affiche se découpe en plusieurs images ; d’emblé, on voit ici la triple fonction de ce découpage : une fonction narrative (un héros et un protagoniste en action) et une fonction de présentation : on reconnaît sans difficulté deux des acteurs principaux : Matt Damon et surtout Tom Hanks. Le ciel est agité et brumeux. Il impose par son manque de clarté une impression d’inquiétude. Le héros est bien identifié. Il est, en gros plan, à la tête de ses hommes. Une image secondaire et en contre jour, située sur la ligne d’horizon, nous montre un soldat armé. Il est seul. Situé sous le buste du héros (dont la tête émerge des nuages), on comprendra aisément qu’il est celui qu’il faudra sortir de l’ombre (la partie sombre de l’affiche) pour le faire rejoindre la lumière (la partie lumineuse) : celui qu’il faudra sauver. Il n’a pas de visage, il pourrait donc les avoir tous. Il est le symbole du soldat (américain) qu’il faut sortir de la tourmente.

 

 

 

 

Amistad

En 1839, "l'Amistad", navire espagnol transportant des esclaves africains, est pris dans une violente tempête au large de Cuba. Une cinquantaine de prisonniers réussissent à se libérer de leurs chaînes et se retournent contre leurs bourreaux, qu'ils passent par les armes. Cinqué, leur leader, oblige le capitaine à les ramener vers l'Afrique, mais celui-ci, profitant de son ignorance, met le cap sur l'Amerique. Jetés en prison, les mutins vont être défendus par deux fervents abolitionnistes, Theodore Joadson et Lewis Tappan, qui engagent un jeune avocat, Roger Baldwin. (source : Allociné.com)

Après avoir décrit les différents éléments de l’affiche (dénotation), essayons de décrypter les messages qu’elle émet (connotation) : Il est tout d’abord notable que cette affiche décline plusieurs images : Un levé de soleil qui barre l’affiche horizontalement, une chaîne qui la coupe verticalement, le buste en silhouette d’un homme noir qui se fond sur une page manuscrite. La ligne d’horizon, qui déchire la page manuscrite, nous montre une aurore, un levé de soleil, signe de renouveau. Le message est clair : il symbolise l’espoir, l’aube d’un nouveau jour ! la lecture va donc de la mort (la fin de la nuit) à la vie (l’espérance). Cet horizon n’est pas attaché à une terre mais à la mer. Cela donne au message une signification universelle (en l’occurrence la fin de l’esclavage) mais aussi l’idée du voyage. La chaîne, qui signifie la servitude, s’impose : elle transforme le voyage en déportation. La silhouette n’est donc pas seulement celle du héros du film : elle symbolise tous ceux qui ont vécu et subit ce transport forcé. Enfin, la page d’écriture nous renvoie à la notion du témoignage. Il s’agit donc bien d’un message adressé à l’humanité tout entière.

 

 

 

 

Films Policiers et films noirs

Jugé coupable (Clint Eastwood)

L’affiche typique du cinéma policier possède un fond sombre doublé d’un jeu sur l’ombre et le flou. On ne note peu de contrastes clairs entre l’ombre et la lumière (contrairement au film d’action où la séparation doit être nette entre un sol sombre et un ciel lumineux), ce qui contribue à créer une ambiance de clair-obscur incertaine. Pour renforcer cet univers, le trouble est d’ailleurs généralement accentué au second plan. Le héros est rarement de face, mais adopte plutôt une position intermédiaire de trois quart (à comparer là aussi avec la présentation du personnage de films d’action). Les regards sont souvent inquiets, et tournés de manière énigmatique vers le hors-champ de l’affiche, soulignant l’incompréhension (momentanée ?) de la situation. Pour ajouter à la complexité du déchiffrage, il arrive d’ailleurs souvent que le visage du personnage principal soit à demi plongé dans l’obscurité. Le héros est ainsi toujours présenté dans une situation difficile, urgente ou indécise. Cette posture correspond à l’enjeu même du film policier : une énigme à résoudre, une situation ambiguë.

En effet, le héros du film policier est toujours un être problématique plongé dans une situation qu’il n’a pas forcément choisit (à comparer avec le héros du film d’action au regard volontaire, tourné et tendu vers un but précis). En fait, le personnage du film policier est rarement présenté comme un « héros » : poussé généralement à agir par nécessité, ayant une compréhension limitée de la situation, face à un ennemi rarement identifié, il ne peut se présenter dans la clarté. Par conséquent, ce personnage ne peut être représenté « en portrait ». La présence d’un pistolet, arme du genre par excellence, est presque systématique (à mettre en relation avec l’arme blanche du film fantastique ou la multiplication des armes de tout genre des films d’action).

 

 

 

La comédie dramatique

Eyes Wide Shut (Stanley Kubrick)

Il nous faut ici nous pencher quelque peu sur la signification des termes utilisés : par convention « comédie » suggère « relation amoureuse » et « dramatique » signifie qu’il y aura autour de cette relation de l’action. La conjonction de ces deux termes aboutit donc à des films (et des affiches) composites. Les couleurs de fond de ces affiches sont plutôt chaudes. C’est le couple qui est le noyau du film. De manière symptomatique, il est au centre de l’affiche, en situation de proximité, voir de contact physique (joue contre joue, front contre front, bouche contre bouche…). Il est même fréquent que les deux personnages principaux ne fassent plus qu’un. Les regards peuvent ainsi être entremêlés mais aussi orientés vers une direction commune (dans le hors champ). Genre plus hétérogène que les autres, l’affiche de la comédie dramatique peut aussi emprunter les codes du film d’action ou du film policier suivant les références revendiquées (se reporter aux catégories citées). En ce qui concerne la comédie sentimentale (l’histoire amoureuse), c’est la qualité de la photo qui compte : elle doit être belle. Les personnages sont détourés sur fond blanc (virginité, pureté…). Pour agrémenté le tout, on trouvera du rose ou du mauve.

 

 

 

 

Le film humoristique

L’affiche du film humoristique possède généralement un fond blanc rehaussé de tons vifs et gais (vert, rouge…). Le ciel y est bleu et sans nuages (contrairement aux ciels des films d’action par exemple). Ceci contribue à créer un univers joyeux. La plupart de ces affiches nous montre les personnages en groupe (avec les codes de la photo de classe ou de la bande de copains). Les personnages nous sont souvent présentés en pied et en action (ils courent ou sautent…). Il y a donc une ébauche de narration qui s’exprime par la reconstitution d’une scène du film. Rires et sourires sont de rigueur, le tout accentué par des regards de complicité avec le spectateur. On dit qu’il y a « effet de masque » : c’est à dire que le comédien est placé en situation de complicité avec le spectateur, donnant l’impression que ce n’est plus le personnage du film qui rit mais le comédien lui-même. Il y a donc peu de place pour le réel dans les affiches des films humoristiques, d’ailleurs, le dessin y a souvent supplanté la photographie.

 

 

Light Dark

Pôle Image Haute Normandie